Mag-Afriksurseine-Mars-2024

GUY RENE TSEM REND HOMMAGE AU PATRIARCHE ALIM KAIGAMA

Il y a quelques jours sur notre site Afriksurseine, je rendais hommage à sa majesté Alim Kaïgama. Patriarche décédé la semaine dernière. Cet hommage émouvant à ce grand dignitaire du Mbam et du nord, a été relayé dans certains journaux. C’est à la suite de cela qu’un autre frère résidant à Pitoa m’a envoyé à son tour ce témoignage, afin qu’il soit publié dans nos colonnes. Lisez plutôt.

  Je m’appelle TSEM GUY RENE. Je suis de père Boulou  de Nkoekouk par Ebolowa et de mère Babouté de Nguila. J’ai lu avec beaucoup d’attention votre bel hommage à l’endroit de Papa Alim. Je souhaite faire le mien sur sa personne et honoré sa mémoire. Papa Alim avait épousé ma tante, c’est-à-dire, la grande sœur à ma mère. A 9 mois, j’ai perdu mon père. Ma mère a dû se résoudre à m’élever avec toutes les difficultés qu’on peut imaginer chez une veuve. C’est à l’âge de 5 ans que j’ai fait la connaissance de papa Alim. Ma mère et moi sommes allés chez lui  pour un bref  séjour, occasion  pour moi de connaitre  ma tante. C’est alors que Papa Alim n’a plus souhaité que je retourne. Je suis donc resté pour toujours à ses côtés.  Papa Alim était enseignant, il décelait vite les fins comportements des enfants intelligents.

En ce moment, il occupait  le poste d’inspecteur de l’enseignement à Bokito. C’est un moment qui va bouleverser ma vie, puisque je vais vivre avec un papa qui me donnera tout l’amour d’un père. Papa Alim a mené une vie remarquable et remarquée, son dévouement envers sa famille et sa communauté, ainsi que ses valeurs profondes inspiraient  bon nombres d’entre nous. Son influence nous a permis  à travers son éducation stricte d’être des hommes distingués. C’est une vie qui foisonne d’anecdotes et de confidences : je vous relate quelques souvenirs marquants. Nous avons fait le constat que les enfants  qu’il élevait chez lui  passaient avant ses propres fils ; c’est ainsi qu’il nous achetait les cahiers et les livres avant ceux-ci. Je me souviens de mon passage à l’examen du  CEPE et du concours du lycée. Il me dira alors que je venais de lui annoncer la bonne nouvelle de ma réussite  que  » si tu  avais échoué,  je serai allé voir le proviseur pour qu’on recorrige tes feuilles, parce que ce serait inadmissible. » Il tenait à l’excellence au point où il faisait reprendre le CM2 à certains  élèves alors que ceux ci  avaient été reçus au CEPE.

Tout simplement parce que le niveau n’était pas bon pour faire la 6ème. L’ambition était de pousser les élèves aussi loin que possible à l’excellence.   Ma première fille porte son nom, je n’ai pas voulu attendre un garçon avant de le designer comme son  homonyme. Tout le monde l’aimait avec spontanéité et déférence ;  il était comme une personne qui se sentait dépaysé lorsqu’il n’était  pas entouré. C’est dire sa grande sensibilité sociale. Il prenait les choses du bon côté, un tempérament jovial, abord facile, c’était une grande âme  dotée d’un  humanisme chaleureux ;  ce qu’il y a de plus cher chez de tels hommes, c’est leur imaginaire, c’était un roi. Un vrai. Un homme qui a voyagé, descendant d’une famille flamboyante. Papa Alim était une personne généreuse. Il était engagé dans la vie de sa famille et de sa communauté, montrant une vivacité d’esprit et une grande piété. Je peux témoigner pour les avoir vécus.

Le rôle exceptionnel que ce papa a joué dans la vie de nombreux enfants de ce pays,   a eu des grandes répercussions dans le Cameroun  et au delà. Il a travaillé dur et a éduqué ses enfants avec sagesse comme il le faisait à ses élèves. Il était une source d’inspiration pour eux,  aujourd’hui il lègue un précieux  héritage à travers son amour pour le village Mbaam.  C’était un homme qui avait une foi profonde, sa connexion avec Dieu et son rôle actif dans la vie religieuse orientaient sa communauté vers la tolérance. Il a rempli une belle vie. On se souviendra longtemps de sa silhouette, familière de chef traditionnel. L’émotion que provoque sa disparition montre qu’il n’a pas eu la possibilité de se retirer à pas feutrés, la communauté Vuté est orpheline de son plus ancien père.  C’est ça qu’on appelle être  patriarche  ou élite dans une communauté ;  ce ne sont pas les moyens matériels qui comptent dans notre existence, c’est la qualité de vie partagée avec ses semblables,  c’est ça qui doit être notre  marque de fabrique.

Papa Alim avait un talent et il a mis son talent au service des autres. Et oui…c’est cela vie. Il faut donner ce qu’on a. Il faut offrir à l’homme une excellente éducation et partout où il ira, il réussira. Le nom de papa Alim Kaigama  restera dans notre esprit. Témoigne le nombre de personnes présentes à ses obsèques. Eh oui… Il faut  remettre à César ce qui lui appartient, il s’est acquitté avec son sceau propre des tâches inhérentes à sa sommité.  J’exprime ma reconnaissance également envers ceux qui ont apporté leur sympathie et leur soutien, soulignant l’importance de la solidarité dans les moments difficiles. La mort provoque une profonde réflexion, des circonstances qui nous poussent à faire une introspection sur nous-même et sur notre existence. Nombreux sont ceux qui vont se sentir orphelins. Si je suis ce que je suis aujourd’hui, c’est grâce à ce digne père. Je prie Dieu de te lui rendre au centuple.

C’est pourquoi, dans la vie d’aujourd’hui, la disparition de ceux qui s’en vont doivent nous faire réfléchir. En même temps qu’on les pleure, on doit admirer leur beau séjour sur terre.  Il faut les célébrer pour longtemps, comme des modèles humains, des images qui reviendront autour de nous pour nous rappeler leur existence unique. Il ne me reste plus qu’à dire merci à Papa ALIM KAIGAMA, pour sa grande compréhension de la vie. Malgré les défis que cette vie implique, il a tenu bon et comme a dit l’écrivain Calvin Djouari dans son témoignage  :   «Majesté Alim Kaïgama c’est une vie d’honnêteté, de respect de l’autre, une vie vouée à la compréhension de notre histoire et de notre identité. Une vie au service des jeunes et de l’universalité. Une vie de sagesse. Nous saluons avec brio sa partition dans la vie qu’il a su admirablement jouer.  »

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