Propos recueillis par Baltazar Atangana
Dans cet entretien, EKWALLA nous parle de son fait littéraire Le sacrifice de Noura, publié en octobre 2022.
Quelques mots sur Judith EKWALLA.
Je suis réalisatrice, productrice, promotrice culturelle, auteure de deux ouvrages Souvenirs Sombres et Clairs et Le Sacrifice de Noura sous le pseudonyme Princesse du Wouri. Je suis installée au Sénégal depuis une dizaine d’année ou j’exerce ma passion.
De quoi parle votre œuvre Le sacrifice de Noura ?
C’est une fiction qui nous entraîne dans un univers de femmes qui se battent pour leur liberté et leur épanouissement, dans des contextes de mariage forcé et précoce.
Au regard de la trajectoire de Binta, Noura, Myriam, protagonistes principaux de votre œuvre, on voit un activisme en faveur de la lutte contre les violences faites aux jeunes filles et aux femmes découlant de votre écriture ?
C’est un combat important pour moi, quand on voit encore dans notre société des femmes qui ne décident rien par elles-mêmes, des jeunes filles qui se retrouvent femmes au foyer à 11 ans ou encore victime de viol. Je suis membre d’une association de lutte contre les violences faites aux femmes et ce que nous voyons, chaque jour, nul ne peut rester insensible à ça : la situation est vraiment grave, et l’impression que nous avons, c’est une indifférence des pouvoirs publics, de la justice et la société civile, nous sommes pourtant tous concernés, car il s’agit de l’avenir de nombreuses filles en péril. Notre rôle en tant qu’artiste et activiste, c’est d’en parler et de dénoncer. Dans vos écrits (Souvenirs sombres et clairs, Le sacrifice de Noura), vous revenez régulièrement sur les Violences faites aux jeunes filles et sur la problématique de la chosification du corps de la femme, qui est encore pris et traité comme un objet dans plusieurs sociétés africaines, en prenant le Sénégal comme prétexte.
À travers cette emphase thématique Ekwalla invite-t-elle avec la dernière énergie les autres femmes à « écrire comme on crie, et on rit d’un rire mélancolique aux dents blanches qui dévoile et dit tout » ?
Les femmes depuis longtemps ont pris l’encre pour un besoin crucial de porter leur voix et celle des autres femmes au-delà des frontières. C’était une nécessité pour se faire entendre entant que femme et surtout entant qu’individu à part entière doté d’intelligence et de savoir, Nos ainées ont porté ce combat qui n’est toujours pas gagné, nous continuons cette lutte pour faire bouger les lignes, et chacune à sa manière apporte sa pierre à l’édifice pour une reconstruction de notre société, plus juste, plus humaine, Alors Oui nous invitons les autres femmes à sortir de leur réserve, à briser le silence et à « écrire comme on crie, et on rit d’un rire mélancolique aux dents blanches qui dévoile et dit tout » ?
L’intrigue se déroule au Sénégal, un pays où l’hégémonie du patriarcat est toujours tendance. Est-ce là, à travers votre œuvre, votre formulation d’une critique vis-à-vis du système patriarcal dans ce pays en particulier, et en Afrique en général ?
Le Sacrifice de Noura est une fiction, qui se déroule certes au Sénégal, mais qui pointe du doigt toutes nos sociétés ou que nous soyons dans le monde, ou les femmes sont marginalisées, les jeunes filles mariées par force ou encore précocement, subissant tout genre de sévices. C’est donc un problème général qui nous concerne tous ou que nous soyons, autant dans les sociétés dites modernes ou traditionnels.
Pour finir, de manière plus globale, pensez-vous qu’il y a un espoir de faire changer ce système patriarcal ?
Il y a énormément d’espoir ! Beaucoup de choses sont en train de changer, quand on voit de nombreuses femmes réussir dans différents domaines, on ne peut que se réjouir, plus il y aura des modèles féminins de réussite plus la société changera vis-à-vis d’elles et elles-mêmes gagneront en confiance et oseront faire des grandes choses. A mon humble avis, le changement ne viendra que de nous-mêmes, en prenant conscience de nos capacités, de nos compétences, de notre rôle dans la société, on gagnera le respect et la considération des autres, On ne parlera plus de système patriarcal, mais d’une société dans laquelle les mêmes chances sont accordées à tout le monde, ca sera à chacune de les saisir, mais il faut que certaines lois soient révisées, qui sont beaucoup plus en faveur de la gente masculine et c’est là le réel défi en ce moment, car malheureusement les préoccupations de nos législateurs sont ailleurs ; la lutte est donc là ! Nous gardons espoir. Merci.