Il y a deux mois, j’ai eu l’opportunité de rencontrer le Dr. Annick Tcham, une cardiologue exerçant à Paris, qui travaille également en tant que praticienne libérale. Lors de notre rencontre, elle a généreusement partagé son expérience professionnelle et sa passion pour son métier. L’équipe d’Afrique sur Seine a saisi l’essence de sa présentation, que nous sommes heureux de partager avec vous ici.
« Je suis le Dr. Annick Tcham, cardiologue d’origine camerounaise exerçant à Paris, spécialisée dans les maladies cardio-vasculaires. Mon métier me conduit fréquemment à traverser les continents en réponse à l’appel du devoir. Mon parcours académique a débuté au Cameroun après l’obtention de mon baccalauréat. J’ai ensuite intégré la faculté de médecine de Cocody en Côte d’Ivoire, où j’ai suivi les trois premières années de médecine. Ces années initiales étaient principalement axées sur la théorie, alors que la médecine requiert dès le départ une forte composante pratique, notamment des stages hospitaliers. Par la suite, j’ai poursuivi mes études à la faculté Victor Segalen de Bordeaux II grâce à une convention entre la Côte d’Ivoire et l’Université de Bordeaux. C’est là que j’ai obtenu mon doctorat en médecine.
J’ai ensuite entamé ma spécialisation en cardiologie en France, où j’ai eu la chance de bénéficier de six années de formation. Actuellement, je travaille à l’hôpital Pitié-Salpêtrière et à l’hôpital Américain de Paris, en plus de mon activité en libéral. En tant que cardiologue, ma mission consiste à prévenir les maladies cardiovasculaires en prenant en charge les facteurs de risque, tout en traitant les patients atteints de cardiopathies ou de maladies vasculaires. Plus précisément, je suis attachée au service de jour de la Pitié-Salpêtrière, où je m’occupe principalement des patients greffés cardiaques et de ceux souffrant d’une insuffisance cardiaque avancée.
À l’hôpital américain, je suis en charge du suivi des patients atteints de maladies cardiaques, tandis qu’en cabinet privé, je suis responsable du suivi des patients atteints de cardiopathies et de la prévention cardiovasculaire. Mon domaine de spécialisation se concentre donc sur les maladies cardiovasculaires, que ce soit pour les patients déjà diagnostiqués (ayant subi un infarctus, par exemple) ou pour ceux présentant de nombreux facteurs de risque cardiovasculaire. La prévention est au cœur de ma pratique, car il est essentiel d’agir avant que les maladies ne se manifestent. Ce qui m’a poussée à exercer cette profession, c’est avant tout ma sensibilité envers autrui. Mon désir de soigner et d’accompagner les personnes malades a été renforcé par l’expérience de mon propre père, qui était gravement malade et nécessitait des soins constants.
L’absence de médecins dans notre famille a également joué un rôle dans mon choix de carrière. J’ai eu l’occasion d’effectuer des stages en pédiatrie au lycée, ce qui m’a permis de me familiariser davantage avec le domaine médical. Le cœur, en tant qu’organe central du corps humain, m’a toujours fasciné. Sa complexité et son rôle vital en font pour moi l’organe le plus intéressant à étudier et à soigner. Mon approche est donc à la fois rationnelle et passionnée. Ma journée type est très variée, chaque journée étant unique. Je rencontre de nombreux patients dans le cadre de mon travail, ce qui demande beaucoup d’attention et de patience.
Mon emploi du temps est souvent imprévisible, car je peux être appelée à tout moment, y compris la nuit, pour répondre aux besoins médicaux de mes patients. Mes journées commencent souvent par des visites médicales auprès des patients hospitalisés, ce qui peut prendre plusieurs heures en fonction des cas. Plus tard, je peux effectuer des consultations médicales en cabinet ou recevoir des patients pour des examens de dépistage ou des tests tels que les échographies cardiaques ou les électrocardiogrammes. Face à chaque patient, j’adopte une approche globale en prenant en compte les facteurs sociaux, environnementaux et individuels, tout en suivant les recommandations médicales et en respectant les directives de l’ordre des médecins. Chaque cas est unique, et il est essentiel de trouver la meilleure solution pour chaque patient tout en restant dans les limites de l’éthique médicale. Exercer la cardiologie est une vocation pour moi. Chaque jour est une opportunité d’enrichir mes connaissances et d’aider mes patients.
Mon travail en libéral me permet de bénéficier d’une certaine flexibilité dans mon emploi du temps et de travailler dans divers environnements, que ce soit dans le secteur public ou privé. La médecine cardiaque est principalement une discipline intellectuelle, bien que certaines situations d’urgence puissent demander une intervention plus physique. En ce qui concerne la rémunération, la médecine cardiaque est une profession bien rémunérée et prestigieuse. Cependant, l’inconvénient majeur réside dans la gestion du temps. Il fut un temps où je devais assumer de nombreuses gardes, ce qui était chronophage et incompatible avec ma vie familiale. Trouver un équilibre entre ma carrière et ma vie personnelle est un défi constant. Prendre des décisions concernant les traitements des patients, qu’ils soient interventionnels ou chirurgicaux, peut être un moment critique et délicat.
Ces décisions impliquent souvent une collaboration étroite entre le patient, le chirurgien et le cardiologue, et elles peuvent être difficiles à prendre, car elles ont un impact direct sur la vie des patients. Le principal défi auquel nous sommes confrontés est de sensibiliser les gens à l’importance de la prévention des maladies cardiovasculaires. Les facteurs de risque tels que l’hypertension, le diabète, le tabagisme et l’hérédité sont souvent asymptomatiques, ce qui signifie que les gens ne ressentent pas de symptômes avant que des complications graves ne surviennent. Mon travail au Cameroun se concentre sur la sensibilisation et la prévention de ces facteurs de risque. Il est essentiel que les gens comprennent l’importance de la prévention avant d’être confrontés à des problèmes de santé majeurs. Je lance un appel aux autorités de la santé nationale pour qu’elles facilitent les campagnes de dépistage des facteurs de risque, la formation sur les maladies cardiovasculaires et l’accès aux soins.