Mag-Afriksurseine-Mars-2024

SANDRINE FANSI ECRIVAINE INTERVIEW

Sandrine FANSI est une jeune écrivaine camerounaise qui vit en France. Elle vient de publier un livre autobiographique dans lequel, elle raconte ses nombreuses péripéties de la vie. Afriksurseine l’a rencontrée pour en savoir davantage sur sa vie et sa carrière de littéraire.

Bonjour Sandrine et merci de nous accueillir, nous savons que vous êtes une femme des médias, mais il y a certaines personnes qui vous découvriront aujourd’hui. Est-ce qu’à ces personnes-là, vous pouvez vous présenter ?

Merci pour votre accueil…En quelques mots, je suis Sandrine FANSI, j’habite la région parisienne et je suis maman de 3 enfants. A côté de mon activité salariale de Cadre dans le secteur Bancaire, je suis Coach Professionnelle certifiée, conférencière et auteur du livre ‘Sandrine la résiliente, de sans-papiers à marraine républicaine.’

Quel a été votre parcours scolaire et professionnel ?

J’ai fait mes études primaires et secondaires au Cameroun avant d’arriver en France illégalement après l’obtention de mon Baccalauréat en 2015, alors que j’entamais ma première année de Licence à l’université de Douala. Quelques années plus tard, après ma régularisation, j’ai travaillé comme Caissière dans un hypermarché durant 8 ans. Après la naissance de mon 3ème enfant, traversant une période très difficile, j’ai décidé pour m’en sortir de reprendre mes études. A 32 ans, je retournais sur les bancs de l’école pour préparer un BTS Négociation et Relation Clients, Major de promotion, j’ai poursuivi en Licence Banque puis en Master que j’ai brillamment décroché en juillet 2019. J’ai par la suite en 2020, décidé de monter en compétences, mais surtout d’acquérir la méthodologie et les outils adéquats pour cette nouvelle activité, que j’avais entamée bénévolement et qui me passionne : le Coaching. J’ai donc obtenu au bout de 9 mois de formation et avec félicitations du Jury, ma certification de coaching professionnel à la Haute École de Coaching de Paris.

Votre CV est volumineux, est-ce pour cette raison que vous vous êtes lancée dans l’écriture  ?

Avant toute chose, je souhaitais graver pour ma progéniture, mon histoire et mon parcours d’intégration dans ma terre d’accueil. La France. Pour qu’ils puissent connaître le début de leur histoire. Aussi, durant mon parcours, mon histoire, qui était jugé atypique, interpellait plus d’un. J’étais par exemple sollicitée par mes anciens enseignants pour venir motiver les apprenants ou dans les associations qui m’avaient soutenue pour booster les bénéficiaires. C’est d’ailleurs ainsi que j’ai commencé mes accompagnements de manière bénévole auprès des jeunes et des femmes des quartiers prioritaires. J’avais très vite fait le constat que le déclic se manifestait à de nombreuses personnes,  chaque fois que je racontais mon histoire. Et ces personnes racontaient à leur tour mon histoire pour booter leur entourage.

J’avais eu l’idée de créer une structure d’accompagnement (HOPE4U qui veut dire espoir pour toi) pour former avec les personnes que j’avais accompagnées, une chaîne dont le but serait d’aider plus de personnes dans le besoin. Grâce à mon projet, j’ai eu la chance de participer à 2 concours nationaux Altern’Up 2019 et le concours de la résilience professionnelle en 2021, arrivée finaliste à ces concours, les jurys ont renforcé mon ambition en me motivant à écrire et publier mon histoire qui selon eux pourrait changer des vies. La peur de revivre tous les traumatismes en écrivant mon histoire me tétanisait même si au fond de moi l’envie était forte. C’est la crise sanitaire de la COVID 19 qui m’a motivé à sauter le pas.
En effet,

– J’avais perdu quelques semaines avant mon amie du même âge que moi. Nous avions longuement échangé sans tabou et à écouter ses regrets, j’avais compris qu’il fallait réaliser ses rêves.
– Aussi, durant la crise, plusieurs connaissances dont les jeunes sont décédées brutalement. Moi-même ayant été touchée 3 fois, j’ai craint de partir sans accomplir mes missions. Surtout qu’à ce moment-là, partout, tout allait mal.
– Le taux de suicide était en augmentions en Occident et de l’autre côté de la méditerranées des personnes mettaient leur vie avec celle de leur famille souvent, en danger pour espérer avoir une vie meilleure ailleurs. Et ceux qui avaient la chance d’arriver, vivaient dans des conditions effroyables (ignorées au départ) dans les rues de la capitale. Tous ces maux avaient sur moi un impact significatif à cet instant sont nés mes prétentions. Le titre de marraine républicaine reçu par les élus à la Mairie de Paris en décembre 2021 pour me remercier des actions en faveur des migrants, a été pour moi ancienne « sans papiers » le véritable cadeau du ciel. Ce qui m’a décidément convaincu que c’était le moment d’écrire et publier mon histoire pour témoigner de ma gratitude, mais surtout pour porter mon espoir à ceux qui en avait peu.

Pouvez-vous, nous présenter vos différentes œuvres ?

Actuellement, j’ai 2 œuvres :

– Le livre « Sandrine La résiliente, de sans papier à marraine républicaine » dans lequel je raconte mon histoire d’intégration sociale et professionnelle depuis mon arrivée chaotique en France il y a une quinzaine d’années. Le Cahier d’exercice de la personne résiliente (5 étapes pour se relever après un traumatisme, une épreuve ou un échec) qui a été réalisé avec Kriss Brochec, en support de l’accompagnement des personnes dans le parcours de résilience

Dans quel genre s’inscrivent-elles ?

Il s’agit d’un livre autobiographique écrit sous forme  romantique

Dans tout livre, il y a le sujet apparent et le sujet profond. Quel est le sujet profond de ce livre ?

Le sujet profond de mon livre est indéniablement LA RESILIENCE, qui est selon le Docteur Boris Cyrulnik, père de la résilience en France (que j’ai d’ailleurs eu la chance de rencontrer en décembre 2022), la capacité pour une personne à continuer à se développer et à se projeter dans l’avenir en débit des événements déstabilisants, des conditions de vie difficiles ou de traumatismes sévères. C’est donc un processus qui permet de bien s’adapter face à l’adversité/aux épreuves de la vie.

A la lecture de votre livre, on est impressionné, c’est votre force mentale qui vous a permis de surmonter les obstacles de la vie. A présent, pourquoi publier un tel ouvrage alors que vous êtes encore à chemin de la vie ?

J’ai décidé de publier mon histoire à ce moment de ma vie parce que je sais plusieurs personnes ont traversé, traversent et traverseront les épreuves douloureuses que j’ai vécues, seules, sans des fois oser en parler et être aidées. (viols durant mon enfance et mon adolescence, immigration, rapatriement, vie de sans-papiers, exploitations, violences physiques et psychologiques, accompagnement en fin de vie et décès des parents, séparation, tentatives de suicides…). Je veux à travers mon histoire déjà les montrer qu’elles ne sont pas seules, les aider à prendre conscience et à développer leurs capacités de résilience qui les aidera à rebondir après ces traumatismes, mais surtout à leur donner les clefs pour puiser dans ces épreuves douloureuses, la force et la détermination de se relever beaucoup plus fortes et se réaliser au-delà de leur espérance.

Je suis consciente que s’il plaît à Dieu, le chemin est encore long et que je vivrai beaucoup d’autres événements douloureux pour lesquels ma capacité de résilience sera plus que sollicitée, mais je fais confiance en ce même Dieu pour m’apporter des solutions afin d’être pour d’autres un témoignage et une source de persévérance et d’espoir. Avez-vous voulu faire passer un message, réveiller les consciences ou simplement raconter une histoire comme une autre ?

Au-delà de mon ambition d’éveiller des consciences sur des sujets encore tabous (notamment en Afrique). C’est un message d’espoir que j’ai souhaité passer et le portant haut, fort et le plus loin possible passer à ceux qui en ont peu, afin de leur permettre de CROIRE que malgré toutes les épreuves, même les plus difficiles de la vie, UN AVENIR MEILLEUR est ENCORE POSSIBLE. Au vu des retours, mais surtout des témoignages extraordinaires que je reçois depuis la publication de mon livre, je suis comblée d’avoir pris cette décision d’écrire et publier mon histoire, car il est en train de changer et changera beaucoup de vie.

Depuis quelques jours, une jeune camerounaise de 17 ans est menacée de condamnation au nord du Cameroun, pour avoir critiqué les maux qui minent sa société, que pouvez-vous déclarer dans cette affaire ?

Comme je l’ai mentionné précédemment, plusieurs sujets comme l’inceste, le mariage forcé, les violences psychologiques, et même physiques, le divorce, … Restent encore tabous en Afrique. Encore plus dans des zones rurales ou le poids des traditions restent encrées et ou l’accès à l’information est difficiles. Tenter d’éveiller des consciences sur ces sujets peut très vite être perçu comme une rébellion ou une tentative de désapprouver, modifier ou renier des valeurs locales, généralement anciennes et transmises depuis des générations. Je pense que lorsqu’il s’agit de tels sujets qui mettent en danger les vies des milliers de personnes. La stratégie d’approche devrait être plus stratégique en mettant plus en avant l’intérêt commun plutôt que de pointer du doigt/critiquer /dénoncer les pratiques/traditions ancrées. Aussi, les autorités pourraient peut-être accompagner les personnes souhaitant dénoncer ces maux, en instaurant par exemple le dialogue avec les autorités locales (chefs des villages, représentant des familles…) afin de bien leur expliquer/montrer le bien-fondé des démarches, mais aussi pour marquer leurs approbations.

Quand écrivez-vous ? Avez-vous un rituel d’écriture ? Rédigez-vous un plan à l’avance ou glissez-vous vos doigts sur la feuille puis le clavier ?

L’écriture de mon livre n’a pas du tout été un exercice facile. En dehors des torrents de larmes que j’ai versées durant la rédaction, car je revivais les événements douloureux. Il a fallu en amont m’organiser et trouver du temps entre mon activité salariale, mes formations, mes accompagnements, la gestion de ma vie au quotidien et notamment de mes trois enfants,… Pour écrire. Après l’échec de plusieurs stratégies mises en place, j’avais fini par trouver la bonne. Un alarme que j’avais nommée ‘Courage la résiliente’, me réveillait à 5h tous les matins de la semaine. Je sortais (difficilement au départ) de mon lit, prenais mon ordinateur et commençais à écrire au moment de ma vie jusqu’au réveil des enfants.

 

L’écriture peut-elle être considérée comme une arme de combat ? Existe-t-il une écriture féminine ?

L’écriture est une manière de transmettre des informations personnelles ou publiques, positives ou jugées négatives par certains. Ces informations par l’écriture restent gavées et servent aux générations présentent et futurs pour connaître l’histoire et/ou pour améliorer le futur des fois avec des résistances. En cela, c’est une réelle arme passive de combat. Pour ce qui est de style d’écriture, je pense comme Günter Grass, écrivain allemand et prix Nobel de la littérature en 1999 que « L’écriture spécifiquement féminine, cela n’existe pas ! L’écriture est universelle.»
Chacun écrivain homme ou femme, a son style et sa manière propre à lui de poser ses mots.

Le livre est considéré comme une carte qui guide l’homme sur le sentier de la vie, votre livre répond-il à cet idéal ?

Complétement ! Comme je l’ai mentionnée plus haut, ma mission pour ce livre : va et impacte… est en train d’être accompli au-delà même de mes espérances au bout de seulement 6 mois de sa publication. Au vu des retours, mais surtout des témoignages extraordinaires que je reçois depuis sa sortie, je suis comblée d’avoir pris cette décision d’écrire et publier mon histoire, car il est en train de changer et changera beaucoup de vie.

Le monde a connu ces dernières années de très grands mouvements de son histoire, avec la COV 19, et les guerres par exemple celle de l’Ukraine. Quelle est la place de l’écriture dans un tel contexte ?

La place de l’écriture est plus qu’importante dans la société, encore plus lorsque le monde et donc les personnes traversent des moments de trouble. Il permet déjà à la personne qui écrit, entre autres, de poser les mots sur les maux et donc de soulager ses souffrances en atténuant les symptômes de la dépression qui peut avoir un fort impact sur son entourage. En plus d’être une réelle thérapie, l’écriture lui permet de faire passer un message qui peut répondre aux besoins de plusieurs. Pour le lecteur, en plus d’augmenter ses connaissances, lire lui permet en temps de crise de s’informer, mais aussi de se changer les idées et de s’évader. D’ailleurs selon un sondage Harris réalisé pour le site Actualité, durant la période Covid, 54 % des français ont lu au moins 1 ouvrage, score qui n’avait pas été encore été atteint…..

 où trouver vos livres ? Et votre mot de fin.

Mon livre ‘Sandrine la résiliente, de Sans-papiers à marraine républicaine’ est disponible sur Amazon. Il est aussi possible de me le commander directement par mail : sandrinelaresiliente@gmail.com, afin que je l’envoie avec en prime, ma dédicace. Quelles que soient les épreuves que vous avez traversées, que vous traversez ou/ et que vous traverserez, continuer à rêver, mais surtout donnez-vous les moyens d’oser afin de vous réaliser, car tant qu’on a le souffle de vie… Rien n’est perdu !!!

 

 

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