C’est au détour d’une réflexion, nourrie par des échanges passionnés sur les réseaux, que l’idée d’écrire cet article a doucement germé en moi. L’effervescence des opinions partagées, la richesse des souvenirs évoqués, et l’intensité du débat m’ont touchée au point de vouloir en prolonger l’écho. Trouvant ce sujet si captivant et profondément humain, j’ai ressenti l’irrésistible envie d’en faire une chronique, une manière de porter ces réflexions au-delà des écrans, afin que cela puisse toucher un public plus large. Ainsi, avec l’espoir d’allumer quelques étincelles de nostalgie ou de réflexion, j’ai pris la plume pour donner vie à ces idées.
Les enfants d’aujourd’hui sont souvent comparés à ceux des générations passées, et cette comparaison révèle des évolutions significatives dans leur mode de vie, leur autonomie et les responsabilités qui leur sont confiées. Selon de nombreux témoignages, les enfants des années 50 et 60 semblaient jouir d’une liberté et d’une indépendance bien plus grandes. Ils préparaient souvent leur propre petit déjeuner et jouaient dehors sans la surveillance constante des adultes. Ils grimpaient aux arbres, se promenaient seuls ou en groupe, et inventaient des jeux en plein air qui nécessitaient peu de matériel mais beaucoup d’imagination.
Cette époque est souvent décrite avec nostalgie, comme un âge d’or de l’autonomie enfantine. Les parents, à l’époque, n’hésitaient pas à confier de petites tâches ménagères à leurs enfants, les habituant ainsi à la prise de responsabilité dès leur plus jeune âge. Les enfants allaient souvent seuls à l’école, parfois en traversant des champs, quel que soit le temps, ou parcouraient plusieurs kilomètres à vélo. Ils apprenaient à gérer les aléas de la vie quotidienne, comme se débrouiller avec des vêtements mouillés ou faire face aux chutes lors de leurs premières expériences à vélo. Ces moments étaient riches en aventures et en apprentissages, puisque cela forgeait leur caractère et leur indépendance. Le contraste avec aujourd’hui est saisissant. Les jeux simples et spontanés en extérieur ont souvent cédé la place aux heures passées devant des écrans.
L’apparition de « l’enfant roi », un concept où l’enfant est placé au centre des préoccupations parentales, a bouleversé les dynamiques familiales. Les parents modernes, souvent pris par leurs obligations professionnelles, tendent à surprotéger leurs enfants, à limiter leur autonomie, et à leur éviter le moindre risque. La peur des accidents et le besoin constant de surveillance ont contribué à restreindre leur liberté. Dans les années 60, les familles étaient souvent plus nombreuses, et les aînés jouaient un rôle essentiel en prenant soin des plus jeunes. Les enfants étaient moins « précieux » au sens où ils étaient encouragés à explorer le monde par eux-mêmes et à assumer des responsabilités dès leur plus jeune âge.
À dix ans, beaucoup faisaient déjà le ménage, préparaient les repas, et aidaient aux travaux domestiques ou agricoles. Ces expériences, loin de les surcharger, leur donnaient le sentiment d’être utiles et d’appartenir à une communauté. Les récits des générations précédentes regorgent de souvenirs de jeux collectifs, d’explorations en pleine nature et de bricolages improvisés. Qu’il s’agisse de fabriquer des arcs et des flèches, de construire des igloos ou de descendre des pentes enneigées en luges attachées les unes aux autres, les enfants trouvaient toujours des moyens de se divertir avec ce qu’ils avaient sous la main.
Ces activités, bien que parfois marquées par des bosses et des égratignures, offraient un apprentissage précieux de la résilience. Le basculement vers une éducation plus protectrice s’est accentué avec l’entrée massive des femmes sur le marché du travail à partir des années 70, un changement social porté par les mouvements féministes. Cette évolution a redéfini le rôle des mères et modifié la relation mère-enfant. Pour compenser leur absence, beaucoup de parents ont pris l’habitude de faire davantage pour leurs enfants, au point parfois de les maintenir dans une forme de dépendance prolongée.
Là où, autrefois, les nourrissons étaient mis sur le pot dès sept mois, il n’est pas rare aujourd’hui de voir des enfants porter des couches au-delà de trois ans. Les souvenirs de ceux qui ont grandi dans ces époques plus autonomes dessinent une enfance libre, où l’on apprenait très tôt à se débrouiller seul, à surmonter les difficultés, et à apprécier la richesse des petites choses. En contraste, le mode de vie des enfants d’aujourd’hui semble plus cloisonné, marqué par une hyper-vigilance parentale et une dépendance accrue aux technologies. Pourtant, les récits d’autrefois témoignent de l’importance de la liberté et de la responsabilité dans la construction de l’autonomie et de la confiance en soi des enfants.