Mag-Afriksurseine-Mars-2024

ENCORE DES MORTS AU DESERT

Dans un isolement semblable  des premiers âges du monde, de jeunes hommes et femmes avancent. Ces hommes qui avancent comme  un cortège silencieux sont des migrants. En tête de ce groupe, quatre silhouettes portent une dépouille, soigneusement vêtue, comme un corps fraîchement sorti d’une soirée de fête. Ils avancent lentement dans le sable, à quatre heures du soir, sous la lueur déclinante du jour. Le corps est celui d’une jeune femme, élégamment habillée, ses vêtements bien taillés qui montrent la  grâce d’une femme qui aimait la vie. Bientôt, elle sera déposée dans un trou hâtivement creusé avec des pelles en bois.

Ce tombeau, qui aurait dû mesurer 1m50, n’a été creusé que sur 30 cm de profondeur. Les jeunes enterreront leur camarade en lançant des messages aux futurs aventuriers, les prévenant des dangers qui les attendent sur la route du désert. Ainsi, cette jeune femme, ayant choisi un destin périlleux malgré les avertissements, verra son corps reposé dans un lieu inconnu, au cœur des premières solitudes du monde, loin de ses parents et peut-être de ses enfants. Cela s’est passé il y a tout juste trois jours, dans le désert. Ceux qui l’ont déjà traversé connaissent bien la souffrance qu’on y endure : les dunes infinies, le sable brûlant, le vent implacable, les vipères, les rares arbustes et le soleil de plomb. Aucun point d’eau, aucun grand animal, seulement des souris, des rongeurs, des insectes et dans le ciel, des oiseaux planant.

C’est dans ce désert que de jeunes Camerounais, garçons et filles, solidaires dans les premiers jours, ont souvent tenté leur chance, et c’est là aussi qu’ils sont comme des vermillent qu’on enlève souvent sur les routes des champs ; ces images beaucoup l’ont vu hier  sur les réseaux sociaux. Les jeunes ne cessent de rêver d’aventure, les yeux fixés vers l’Occident, une longue romance qui se poursuit malgré la désillusion croissante. Aujourd’hui, il n’y a plus de coup de foudre avec l’Occident, seulement le rêve persistant d’une aventure, qui finit souvent dans les sables mouvants du désert, qui laisse  derrière elle des histoires de courage et de tragédie, de désir et de perte, écrites dans le sable éphémère du temps.

Loading

Tendances

A Lire aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut