Le pasteur Songsaré est un personnage emblématique de l’église évangélique du Cameroun, reconnu pour son engagement infatigable en faveur des chrétiens en général et des Vutés en particulier. Son histoire et son action sont profondément liées à la création des écoles protestantes dans des nombreux villages du Cameroun comme à Yangba où j’ai fait mon école primaire. En même qu’il officiait, il enseignait également : c’était dans les années 60-70. Il a beaucoup œuvré face à la vague d’analphabétisme qui frappait la région du centre et menaçait la jeunesse à la délinquance. Il a régulièrement lancé, – au temps où il était président de l’église évangélique du Cameroun-, un cri d’alarme à ses concitoyens, appelant à la solidarité et à l’aide envers les plus démunis restés dans les coins reculés du pays. Cet appel a toujours été entendu parce qu’il luttait aussi contre la pauvreté. Son action a permis à l’époque de créer une école dans certains villages, afin de redonner la dignité et l’espoir. Le nom du Pasteur Songsaré est une référence dans la communauté Vuté.
Ce qui est plus marquant, il a commence par fonctionner de manière autonome avec des moyens limités. Le pasteur Songsaré est toujours là, il continue son activité spirituelle, un engagement qu’il s’est donné tout au long de sa vie, plaidant également pour des politiques sociales plus justes, aidant les Vutés à trouver des emplois, et défendant la dignité de beaucoup d’entre nous. (car par exemple, où il fit libérer un chef de village qu’on avait mis en cellule à Ntui). Il a également participé à des mouvements internationaux pour la justice sociale et a été un défenseur de la paix pendant les conflits de Bakassi.
Un Héritage Vivant
Aujourd’hui, le pasteur est plus vivant que jamais. Il a laissé un impact indélébile sur la conscience collective des Vutés d’hier et d’aujourd’hui, rappelant à tous, l’importance de la prière, de la solidarité, de la compassion. Son héritage perdure à travers le travail acharné de la communauté des Vutés, et de ceux qui ont été inspirés par sa vision d’un monde plus juste et plus compatissant. Sa foi en Dieu, son amour pour l’humanité et sa vision d’un avenir meilleur pour les Vutés ont guidé ses pas au cours de son existence. Il a montré à tous les fidèles que la religion pouvait être un moteur puissant de changement social, basé sur l’amour, et la foi en un avenir. Son héritage continue d’inspirer des générations de personnes à œuvrer pour la communauté, avec une conviction de sage.
C’est un papa que j’ai singulièrement admiré. J’ai quelques anecdotes et un témoignage que j’aimerais partager pour étayer mon article sur le pasteur Songsaré. J’aime le titiller quand je le rencontre. Lors de ma dernière visite au Cameroun, je l’ai rencontré à Ntui. Alors je l’aborde et le salue avec toute la courtoisie qui s’impose, puis je me présente. « Je suis l’enfant de tel…» Il s’écrie et appelle sa femme, » voici l’enfant de tel. » Il commence par me donner mes racines avec des références sur les dates, me parle de ma de ma lignée. Je suis ému. Prenant la parole à mon tour, je le titille. « Taki j’ai appris que tu es maintenant témoin de jehovah. » On éclate de rire. Il me répond sagement : « Je ne suis pas encore arrivé à ce stade. » Nous rions aux éclats, le proviseur Ngoundou Garba était présent. La deuxième fois, c’est à douala. Il y a ici deux anecdotes. J’évoque la première anecdote. Les choses se sont toujours passées devant. Il rencontre un Vuté dont je tais le nom ici qui a voyagé dans les années 58. Il rappelle à l’homme les circonstances de son départ et parle longuement des parents de ce dernier et l’état dans lequel ceux-ci étaient restés après son départ. L’homme est sous le choc.
L’autre anecdote, met en lumière l’impact positif qu’un homme de Dieu peut avoir sur la vie des autres, quel que soit son chemin spirituel ou religieux. Il est venu saluer une de ses anciennes élèves qu’il avait enseignée dans les années 68 à Yangba. Celle-ci est absente à la maison, parce que son mari est gravement malade et interné à l’hôpital Laquintinie, il demande à s’y rendre. On l’accompagne. Nous retrouvons le malade, celui-ci est presque mourant, depuis 4 mois la maladie l’a affaibli. Une fois arrivé, le pasteur s’assoit sur le lit du malade. Les deux dialoguent pendant deux heures puis il demande à son malade…Est-ce que je peux prier pour toi ? Le malade qui n’a jamais mis pied dans une église au cours de son existence, le regarde dépaysé, les yeux hagards, la langue pendante. La femme fait un signe de la tête à son mari d’accepter.
Le pasteur se met en prière et prononce quelques mots simples. « Seigneur accorde lui encore la vie, ses enfants sont encore tout- petits…son premier fils n’a que 12 ans… » La prière achevée, il se lève et dit aurevoir. La femme du malade l’accompagne à la sortie de l’hôpital, et le pasteur prend son taxi. Lorsqu’elle retourne, elle trouve son mari debout qui dit avec conviction qu’il se sent guérit et qu’il souhaite rentrer à la maison. Un malade voisin de son lit qui a écouté attentivement la prière se sent aussi guéri. Mais le pasteur est déjà parti. J’évite de prononcer les noms de mes personnages. Le pasteur Songsaré un papa remarquable aimée et respectée au Cameroun venait de faire un miracle.
Son geste de prière pour le frère malade à l’hôpital, bien que simple en apparence, a eu un effet profond et qui a conduit aussi à la guérison d’un voisin malade. Les actes de bonté et de compassion envers autrui transcendent les barrières religieuses. Le papa Songsaré est un bel exemple au milieu du peuple Vuté. Je sais que des témoignages abondent et rappellent que chaque personne a le pouvoir d’influencer positivement la vie des autres par de petits gestes, de soutien et d’amour. Il est important de reconnaître et de célébrer de telles personnes qui incarnent des valeurs universelles et d’empathie. Les « mythes vivants » comme le pasteur Songsaré sont des sources d’inspiration pour nous tous, nous rappelant que nous pouvons tous faire une différence dans le monde en faisant preuve de générosité et de sollicitude envers nos semblables.