Par Michel Lobé Etamé
Dans un contexte géopolitique qui se détériore tous les jours, les pays de l’AES (Association des Etats du Sahel – Burkina Faso ; Mali ; Niger) sont soumis en permanence à des tentatives de déstabilisation et de coups d’Etat. A ce climat violent s’ajoute une guerre déclarée menée par les jihadistes bien équipés et solidement implantés dans les pays limitrophes du Maghreb devenus les bases arrière des terroristes. Ce combat est journalier depuis le départ forcé des bases militaires étrangères de ces pays. Il se poursuit pour que les pays de l’AES implorent de nouveau « l’expertise militaire » occidentale. Mais il n’en sera rien. Ces pays sont décidés à assurer souverainement leur sécurité. Qu’est-ce qui justifie ce climat de violence permanente ? Il y a trois raisons à ces machinations solidement préparées dont les buts inavoués sont les suivants :
– Le rejet de l’emprise néocoloniale par la jeunesse africaine ;
– Le rêve inavoué des puissances musulmanes d’imposer la charia en Afrique noire ;
– La détermination aveugle des multinationales à imposer des dirigeants soumis et corvéables à souhait par l’ancienne puissance coloniale. En effet, trois coups d’Etats ont permis l’accession au pouvoir des hommes charismatiques (Burkina Faso, Mali et Niger) bien décidés de s’affranchir du joug colonial qui n’a toujours pas pris de ride dans une relation systémiquement déséquilibrée. Les Etats de l’AES poursuivent tous un même but : le développement économique et social. Ils ont un même mot d’ordre : la souveraineté économique, politique et monétaire.
Un climat de confiance et de paix est indispensable pour réaliser le rêve de liberté si cher à la jeunesse africaine et propice au développement et à l’épanouissement du citoyen. Cette liberté qui est un droit fondamental a toujours fait défaut à l’Afrique depuis les indépendances étriquées. Notre vaste continent est toujours dirigé par des dictateurs qui se maintiennent au pouvoir par des élections truquées malgré l’âge et la maladie. Ils y parviennent parce qu’ils sont sous la bonne grâce de leurs protecteurs néocolonialistes bien décidés à piller les richesses endogènes qui alimentent les industries des pays riches.
Or la jeunesse africaine éveillée ne supporte plus cette relation incestueuse. Elle a choisi la voie de la rupture. Et elle a raison. Cette rupture aurait pu être moins violente et permettre aux nouvelles figures d’émerger avec une jeunesse résiliente, épanouie et capable de relever les défis d’un nouveau monde. Mais les néocolonialistes ne l’entendent pas de cette oreille. Ils veulent poursuivre une politique de soumission. Pour cela, ils ont à leurs services les dirigeants africains mal élus et des coquilles vides savamment dénommées Union Africaine, CEDEAO ou CEMAC. Ces organismes où la parole est confisquée trahissent consciemment leurs idéaux de liberté, de fraternité et de solidarité envers leur mère Afrique. Pour régner à vie, ils se soumettent aux lobbys de la françafrique nostalgique d’un passé esclavagiste et colonialiste.
Pourtant, les défis de l’Afrique sont immenses. Ils ouvrent un espace de questionnement sur la liberté, la souveraineté et surtout le développement social et industriel. Or les politiques menées jusqu’ici se sont révélées inefficaces et improductives. Elles deviennent insupportables pour la jeunesse qui rompt son frein. Le chômage, la maladie, la pauvreté galopante réduit l’espérance de vie et l’espoir d’un lendemain meilleur car les pouvoirs politiques africains n’ont aucune perspective. Les dirigeants choisis et imposés par l’Occident ne sont pas à hauteur de leur tâche.
D’où cette colère qui gronde de Kinshasa à Malabo, de Libreville à Nairobi, de Yaoundé à Yamoussoukro, de Dakar à Addis-Abeba, etc. Les conséquences sont nombreuses, fâcheuses et terrifiantes. La jeunesse africaine est contrainte d’émigrer avec la complicité de leurs dirigeants sans ambition patriotique. Cette jeunesse, force vive du continent, meurt aux bords de la Méditerranée, sous les regards condescendants des médias du monde. Ces images sont insupportables et n’émeuvent pas les dirigeants africains corrompus et insatiables.
Soutiens populaires
Les coups d’Etat dans les pays de l’AES répondent à une volonté de souveraineté de la jeunesse. Ils sont accueillis par une ferveur populaire qui ne trompe pas car la jeunesse est désabusée et elle doute. Un vent de changement est réclamé par toute la jeunesse africaine qui aspire au bien-être, à la souveraineté politique, économique et monétaire et qui ne supporte plus la soumission, les ingérences étrangères et les mensonges des pouvoirs politiques incapables de se réinventer. Aujourd’hui, à l’heure des médias libres et disponibles, l’information n’est plus le monopole des états, ni des médias néocoloniaux.
La jeunesse peut juger et avoir une opinion objective sur les évènements. Elle se cultive et choisit librement ses sources d’information. Un autre combat déstabilise l’Afrique : le jihadisme. Véritable métastase, il se retrouve partout en Afrique où les frontières sont poreuses et les armées mal équipées. Ce combat est aussi prioritaire. Il s’impose à l’Union Africaine qui devrait mutualiser ou fédérer les armées pour débarrasser l’Afrique d’une puanteur alimentée par les pays arabes. Car, l’ennemi, nous le connaissons. Il est donc plus facile de le neutraliser à l’intérieur de notre continent. Mais pour y parvenir, il faudrait une volonté de l’Afrique noire. Mais celle-ci est fragilisée et divisée par des intérêts égoïstes. Michel Lobé Etamé Journaliste Indépendant