Il m’a fallu passer quelques jours de réflexion, avant de commenter la récente sortie du ministre Atanga Nji. Si la fonction ministérielle est réduite à ce genre de langage, je dirai avec assurance qu’être ministre est une mission facile sur le plan de la communication. Mais je préfère demander pardon à ceux qui ont lu ou écouté ce message, parce qu’un acte maladroit commis par tout camerounais peut rejaillir sur le reste. Le grand banditisme a refait surface depuis plusieurs années. Cela ne date pas d’aujourd’hui. Les grandes métropoles comme Douala-Yaoundé ou encore Bafoussam connaissent un brigandage sans fin. Les modes opératoires se sont transformés et on peut même dire qu’ils se sont modernisés. Les bandits utilisent toutes sortes d’artifices et d’outils pour perpétrer des braquages ou des agressions physiques.
Pour rendre leurs actions plus efficaces, la plupart des brigands utilisent les motos taxis, disqualifiant ainsi les honnêtes citoyens qui s’évertuent à gagner leur vie par la débrouillardise du benskin. Il faut le reconnaitre, les malfaiteurs ont infiltré le « benskinage » rendant ainsi leur relation plus compliquée avec le ministre de l’administration territoriale camerounais qui est aussitôt monter sur les créneaux. Ce qui est important ici, c’est le langage utilisé comme à son habitude à ses sans culottes. Avant de continuer, je préfère citer la sortie du ministre. Il déclare devant la presse nationale et internationale ceci : » Lorsqu’on exerce le maintien de l’ordre, c’est sans états d’âme. Pour me faire mieux comprendre à l’endroit des conducteurs de mototaxis récalcitrants et autres camionneurs. Je souhaiterais vous dire que le maintien de l’ordre, il faut bien le comprendre, c’est le Moulinex et les malfaiteurs pour nous, ce sont les condiments. Lorsqu’on met les arachides, le Djansang, l’ail dans le Moulinex, c’est la pâte qui en sort il faut bien le retenir. »
Il ne s’agit pas d’un discours anodin empreint discourtois, loin de là ; un ministre de Paul Biya ne parle pas au hasard. Mais c’est une sortie d’un homme politique et lucide, qui souhaite de faire comprendre et admettre ce qu’il fera dans les prochains jours, semaines ou mois. Le ministre ne s’adresse pas seulement aux malfaiteurs, mais à tous les camerounais, pour avertir ses hommes d’en face qu’au moindre geste, il exercera la répression la plus terrible. C’est un défi lancer non pas à des benskineurs, mais aussi et surtout il s’adresse à ses opposants. Il veut montrer que le régime a repris ses anciennes méthodes et qu’ils seront mater. C’est là même que se situe sa fonction : celle de maltraiter. S’il y a des femmes, il les coupera les seins pendant qu’il tranchera les pieds des hommes. C’est la réalité politique du machiavélisme pur et dur. Neutraliser les bandits, tout le monde est d’accord… mais les réduire en pâte, montre comment ceux-ci se feront d’abord assommer, torturer avant d’être envoyé au four ; le Moulinex ici s’agrandit, ça peut être le Moulinex utilisé dans une boulangerie pour mouler les pâte. Nous avons tous pouffer de rire, mais il faut retenir que nous sommes continuellement dans une période sombre de notre histoire.
En fait le ministre montre le portrait dont les opposants devront lire. Il vient de fixer ses objectifs, les moyens d’action qui seront mis en place pour rappeler ses outils si le pays entre dans un contexte difficile. Ici, il n’exhorte pas ses concitoyens à reprendre le droit chemin, ou l’équipement pour la sécurité ou encore son renforcement. Il entend les écraser. On dit volontiers de traiter les malfaiteurs avec humanisme, parce que nous-mêmes pouvions être à leur place si on nous avait arrêtés dans nos péchés. Mais le ministre ne nous fait pas réfléchir sur le sens de la vie. Ce n’est pas comme ça que nous allons résoudre les problèmes de l’insécurité, ce qui est important, c’est que nous coopérions, les propos du ministre donne libre cours à chaque individu qui surprendrait une personne en train de commettre un forfait d’être maté. Ce n’est pas comme ça que nous allons cesser de commettre l’injustice et l’insécurité. Pour l’évaluation ou l’expérimentation de la forme d’expression du ministre, ce n’est pas la peine de le critiquer, il ne changera pas. Il utilise le langage du peuple, il y a bien des gens qui finiront forcément par l’aimer. Ses actes attirent sur lui, en plus de l’obscurité, les flammes provoquées par l’incendie qu’il provoquera un jour et qu’il cherchera à éteindre sans l’aboutir, ce jour-là j’espère qu’il sera sur scène en attendant continuer à braquer sur lui les feux des projecteurs.