Francis Ngannou est tombé. Un grand choc dont je ne me suis pas toujours remis. Beaucoup de camerounais ont été touchés dans leur fort intérieur comme moi ; depuis ce désastre, je n’ai pas dormi, c’est comme si j’avais perdu une victoire personnelle. Les champions on ne les a pas tous les jours, Ngannou représente une vertu chevaleresque et le voir massacrer ainsi, touchait l’âme profonde de tout camerounais ou africain ambitieux de ce sport. Mais comme Mike Tyson avait vengé Ali, je crois quelque part au Cameroun, un autre champion se prépare. Pour revenir sur le combat… Techniquement tout s’est joué sur la position de Ngannou face à son adversaire, Joshua se déplaçait très bien sur le ring. Ce que ne faisais pas Francis. avec les gars comme Joshua, il faut aller à la manière camerounaise, c’est à dire le » bouroubourou, » c’est-à-dire le combat de rue. Tu vas avec la technique, tu perds.
Je le disais dans les combats de haut niveau, chaque faux pas risque de conduire au naufrage. Le KO retentissant reçu par Francis Ngannou, résonne comme une symphonie d’erreurs stratégiques même si on sait qu’il y a une concurrence trouble entre le monde du MMA et de la boxe anglaise, il prenait trop de risque au cours du combat en se mettant à distance. Le combat fut le théâtre d’un affrontement entre deux hommes qui faisaient deux arts et les experts avaient signalé que le noble art finirait par l’emporter. C’est-à-dire la boxe anglaise. Revenons encore dans le combat. On a eu hier un professionnel aguerri face à un novice en quête de ses galons.
Pour la première fois, Ngannou s’est retrouvé confronté à un défi réel, un défi empreint de sagacité où l’essence de la boxe anglaise a pris le dessus. Ngannou n’a pas encore la finesse d’un ancien, bien qu’il ait amorcé le combat avec fougue, sa vigilance a très rapidement fléchit, ouvrant la voie à une défaillance de garde qui lui sera fatale. A trois reprises Ngannou s’est retrouvé au tapis. Le premier coup, tel un messager sinistre, l’a projeté au sol avertissant les sombres prophéties d’Anthony d’avant combat. Dans ce moment de désarroi, la sagesse aurait dicté l’abandon, mais dans l’arène est impitoyable, le déshonneur accompagne chaque renoncement.
Ngannou, pris dans l’étau de la détermination, se relève et présente ses gants pour continuer à combattre, le deuxième annonce un deuxième tapis et le dernier coup livré avec une violence inouïe, finit le travail et le plonge dans les abysses de l’inconscience. Anthony, maître tacticien, semblait évoluer dans un autre firmament, tandis que Ngannou errait, perdu dans les méandres d’une défense sans effet. Sa sortie précipitée du ring, tel un fugitif de sa propre débâcle, rappelait les silences funèbres de ceux qui échouent un examen prometteur.
Ce KO, tableau saisissant d’une beauté cruelle, témoigne de la fragilité d’un combattant ; on a vu enfin la vulnérabilité d’un champion face à son destin. Dans cette lutte acharnée, il y a eu deux erreurs selon moi : l’espace laissé à l’adversaire, offrait à Anthony l’opportunité de préparer son assaut, ce dernier se déplaçait très bien, et il était très concentré dans le regard ; il s’est toujours positionné vers la gauche de Francis pour bien l’assommer après l’avoir endormi pour quelques secondes. La deuxième erreur s’est d’avoir voulu faire la même tactique que lors du combat contre Fury.
Tout compte fait Ngannou a dessiné sa propre légende dans les annales de ce noble art. Pour moi il est temps qu’il arrête et se livre à ses affaires. Si les gains sont tentateurs, les coups portés peuvent plonger dans un sommeil sans retour. Les médecins, hier l’assaut de Ngannou, témoignent de cette dure réalité, où chaque coup porte le poids de la vie. Mais dans l’ombre de la défaite, Ngannou rallume l’étincelle du sport africain, ouvrant de nouveaux chemins et insufflant l’espoir dans les cœurs vaillants. On lui dit merci pour les couleurs du Cameroun qu’il a porté au plus haut.