Mag-Afriksurseine-Mars-2024

Vers la fin des autocraties en Afrique francophones ?

Par Michel Lobé Etamé

Les putschs militaires en cours dans les pays d’Afrique francophone marquent la fin d’un cycle de dictatures et des présidents mal élus. Des spécialistes avisés s’émeuvent de leur singularité. Mais ils ont tort, car la jeunesse africaine, plus particulièrement la jeunesse de l’Afrique francophone aspire à la liberté. Elle ne supporte plus les ingérences étrangères dans leurs pays et encore moins la vassalisation de ses dirigeants. La prise de pouvoir par les militaires au Mali, en Guinée, au Burkina Faso, au Niger et maintenant au Gabon a pris à contre-pied les capitales occidentales qui œuvrent depuis les indépendances étriquées pour un statut quo des régimes politiques africains. Le vent qui souffle en Afrique d l’Ouest, prélude des changements des régimes corrompus, atteint maintenant l’Afrique centrale.

Le Gabon en est la première victime, car la dynastie Bongo n’a pas su opérer de mutation et tirer sa révérence après des années de règne sans partage et la pauvreté galopante de sa population. Toute l’Afrique centrale reste la proie des soulèvements à venir avec des dirigeants à bout de souffle. Les putschs militaires, bien que condamnables par définition, sont aussi révélateurs des effets de la mondialisation et l’Afrique suit cette trajectoire. Ses rapports avec l’Occident qui prône la démocratie à l’intérieur de ses frontières et qui l’ignore en Afrique sont de plus en plus tumultueux. Les premiers putschs militaires en Afrique de l’Ouest auraient dû alerter les puissances occidentales sur les déséquilibres démocratiques en Afrique. Mais ils sont restés sourds. Certes, l’Afrique n’a rien à voir avec le printemps arabe.

Mais l’Occident a eu tort de considérer les premiers putschs comme des épiphénomènes. Aujourd’hui, le phénomène se généralise. Il est l’expression d’un continent qui voit le monde évoluer sans lui alors qu’il dispose d’une jeunesse et d’un sacré trésor de richesses naturelles. L’heure n’est pas au bilan. Mais nos amis occidentaux doivent dès à présent prendre en compte les aspirations légitimes de l’Afrique. Des aspirations de liberté, de développement inclusif, mais surtout du droit de disposer de ses richesses. Tous ces putschs militaires sont suivis d’une liesse populaire.

Ils marquent une rupture entre des systèmes qui n’ont plus rien à proposer à leur peuple et qui ne sont pas disposés à respecter leurs institutions. En effet, la crise sécuritaire n’explique pas à elle seule les soulèvements en cours. Le malaise est plus profond. Il est la conséquence des autocraties en place qui bastillonnent toutes les voix discordantes, toutes les velléités de changement politique et surtout, la pauvreté du citoyen. Les réactions des médias étrangers sont en l’occurrence à contre-courant. Ils dénoncent des coups d’Etats des présidents « démocratiquement » élus. Mais ce n’est un secret pour personne.

L’Afrique, francophone croupit dans le déni et dans le mensonge en organisant des élections truquées d’avance. Ces prétendues élections sont couvertes par les observateurs internationaux qui cautionnent la fraude, les intimidations des oppositions politiques, l’emprisonnement de ces derniers dès lors qu’ils représentent une menace pour les potentats en place. Les ONG, jouent-elles leur rôle ? Prompte à dénoncer les coups d’Etats militaires, elles restent muettes quand les prisons des prétendues régimes démocratiques sont pleines d’opposants. La jeunesse africaine est mobilisée. Elle ne supporte plus les ingérences étrangères qui voient l’Afrique comme une chasse gardée des matières premières. Cette jeunesse est active. Elle mène une lutte inégale contre les médias mainstream qui colportent à longueur de journée des informations contradictoires et mensongères. Toute l’Afrique suit en temps réel les événements du continent.

Elle ne se focalise plus aux médias traditionnels dont la propagande est décriée et honnie. Sous la houlette de la mondialisation en marche, l’Afrique éveillée veut participer, de manière active, à son développement. Pour cela, elle ne compte plus sur ses dirigeants actuels élus par une fausse démocratie. Les coups d’Etats en cours marquent la fin d’un système décrié et monocorde. La jeunesse veut une Afrique émancipée, libre, prétentieuse, insoumise et souveraine. Une Afrique affranchie du joug colonial qui continue à la mépriser. Cette jeunesse veut d’une Afrique débarrassée des accords léonins qui la maintiennent dans la dépendance et dans la pauvreté.

Michel LOBE ETAME
Journaliste indépendant

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