Mag-Afriksurseine-Mars-2024

Gabon le temps du constat

Par Yana Bekima

L’heure des comptes

La scène devient tristement banale dans les pays d’Afrique francophone. Des militaires faisant irruption dans les locaux de la télévision d’État pour annoncer à l’antenne la fin du régime politique en place et la destitution du président « légitiment élu » Après la Guinée, le Mali , le Burkina Faso , puis le Niger il y a un mois, c’est au tour du Gabon de subir un coup d’État. Un troisième hold-up électoral aurait été insupportable et inacceptable pour la population, parce que les Gabonais se sont énormément battus pour faire tomber l’empire des BONGO. La mobilisation était massive ces derniers jours pendant les élections et un détournement  des suffrages était  s’avérait compliqué.

L’armée gabonaise qui fait irruption dans le jeu politique.

Peu de temps après l’annonce des résultats, des militaires ont fait leur apparition à la télévision nationale pour annoncer la prise du pouvoir. Ils ont également déclaré l’annulation du scrutin présidentiel et la dissolution de toutes les institutions en raison de ce qu’ils ont décrit comme une gestion calamiteuse des affaires de l’État. C’est un véritable soulagement de savoir qu’un coup d’État électoral a été évité au Gabon. Parce qu’en réalité, les Gabonais s’apprêtaient à descendre dans la rue, et c’est la même armée qui leur aurait tiré dessus comme en 2009 et 2016, sauf que cette fois-ci, les militaires ont décidé de mettre fin au règne des « Bongo ».

Ali Bongo n’a jamais été élu, le pouvoir en place vole les élections, et inverse les résultats : le vainqueur est déclaré perdant et vice versa. Et quand le peuple descend dans la rue, il est simplement canardé. Et s’en suit la même rengaine : « la France suit attentivement la situation et exprime sa préoccupation face à ces événements et souligne l’importance de la résolution pacifique des conflits et du respect de l’ordre constitutionnel ».

Ce n’est pas l’alternance démocratique dont nous rêvions.

Le régime est déposé, mais pas de la façon dont on aurait voulu parce que les Gabonais se sont battus pour que cela arrive par la voix des urnes. Mais qu’à cela ne tienne, le coup d’État qui est arrivé au Gabon est considéré par la population comme un acte de salubrité publique. Parce que depuis 2016, le pays était bloqué, rien ne se faisait, la situation était devenue insoutenable pour les Gabonais et pour l’Afrique. L’armée est donc intervenue comme un arbitre pour mettre un terme à une situation chaotique.

Peut-on à la fois être démocrate et se satisfaire d’un coup d’État ?

La démocratie est une forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté appartient au peuple. Elle s’accompagne par le respect des droits fondamentaux, parmi lesquels le droit de choisir et d’élire librement ses dirigeants. Une démocratie, ce n’est pas seulement le fait d’organiser des élections. En clair, le Gabon n’a jamais été une démocratie. Les Bongo organisent des coups d’État constitutionnels, institutionnels, et électoraux depuis près de 30 ans au vu et au su de tous. Des militaires qui prennent le pouvoir, est-ce la fin des problèmes ? Aujourd’hui, la question de la confiance ne se pose pas, c’est le temps du constat.

Les militaires disent qu’ils vont restaurer les institutions, c’est ce qu’on attend ! Parce que les institutions au Gabon n’existent pas. Nous avons une Cour constitutionnelle qui a été constituée par la famille Bongo, dirigée par la même femme depuis 33 ans, et elle a, à chaque fois, tranché toutes les élections en faveur d’Omar Bongo puis de son fils, Ali Bongo. Avec le temps, les Gabonais l’ont surnommée : « la tour de Pise ». Les Gabonais n’en pouvaient plus des Bongo. 56 ans au pouvoir, c’en était trop. Condamner simplement ce coup d’État, ce serait faire de la démagogie parce que ce que le peuple veut, c’est la libération et peu importe d’où elle vient.

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