Mag-Afriksurseine-Mars-2024

CAMEROUN, CATASTROPHE DE MBANKOLO LES JOURS D’APRES

CATASTROPHE DE MBANKOLO

Par Signe Cathy Laure

Dimanche 8 octobre, la population de Yaoundé  a passé comme à son habitude une journée tranquille ;  certains étaient à la messe, d’autres au marché pour acheter le menu de la semaine, les travailleurs se sont bien reposés. Il est 19 heures à Mbankolo, ce même jour, on est loin d’imaginer ce qui attend ces camerounais des montagnes. Les personnes qui habitent non loin de Mbankolo savent une chose :  les habitants de   ce quartier rentrent tôt lorsqu’ils sont aller faire des tours à la grande métropole.  Ils mangent tôt et se couchent tôt  parce qu’ils sont dans une zone où il fait cruellement  froid  à cause de l’immense forêt qui viennent des montagnes. Ce 8 octobre, la  soirée  s’est vite annoncée, il y a des enfants qui étudient leurs leçons, ceux d’entre eux qui sont  les plus  frêles se sont assoupis, dans ces  maisonnettes mal construites, des  jeunes fêtent l’anniversaire de l’un de leur camarade ; comme partout au Cameroun ce genre d’ambiance attire les non invités qui sont venus au moins voir comment les hôtes d’honneur dansent. Depuis quelques jours les pluies ne cessent de tomber avec insistances, celle de dimanche sera torrentielle, et laissera son nom dans l’histoire de ce quartier.

L’adverse  qui s’était invitée va mettre fin à toutes les activités de la population de ce quartier pauvre.  Un énorme bruit pareil à un tremblement de terre s’est fait entendre. Mais les cris sont étouffés par le torrent d’eau, c’est le silence. C’est la mort qui devient banale en un jour du seigneur. Mbankolo est un vieux quartier, il fait partie des 7 collines connues dans Yaoundé. Oui les  7 collines qui ont donné le nom à cette ville. Il y a 40 ans seulement, nous habituons Tschinga, il nous arrivait de passer dans le coin, c’était la forêt vierge, on apercevait les singes sautillés entre les branches, très vite, c’est devenu un lieu d’habitation des constructions anarchiques, il n’en fallait pas plus pour que ce 8 octobre Mbankolo, la superbe colline, devienne  le tombeau de ceux qui s’y étaient installés. Cet écoulement ressemblait à un bolide. Une secousse comme en temps de guerre. Un bruit, un silence, puis des gémissements et des cris, la fin d’un monde.

La terre venait de montrer une fois de plus ce qu’elle a de  monstrueuse. Le bilan provisoire fait état de 30 morts. Mais le murmure des habitants donnent un  chiffre plus lourd. Que s’est-il passé à Mbankolo ? Mbankolo est une petite montagne verdoyante ;  elle affiche une immense forêt, mais les autochtones ont bradé le terrain ce qui a permis à une population misérable de d’en profiter pour vivre sur une  terre sans histoire. Au sommet de ce mont, se trouve un petit lac artificielle protégé par  un béton mal constitué qui servait de bourrasque. Lorsqu’une pluie torrentielle se déclenche, tout peut y  arriver. Dans notre situation, la puissance des eaux du lac ont brisé cette bourrasque entrainant avec elle, des maisons qui au départ ne tenait pas à cause d’une construction archaïque. L’effondrement est physique et moral pour ces habitants. Après l’éboulement, il y a eu le chaos physique et psychologique.

Les drames de ce genre au Cameroun se succèdent. Nous en sommes à notre Nième éboulements, l’an dernier c’était toujours ce Mbankolo qui l’avait connu ; il y a celui de Bafoussam. Aujourd’hui  c’est Yaoundé. Depuis une semaine, c’est la tristesse, il faut recaser les survivants, des familles ont perdu  plus de 5 personnes. Lorsqu’on regarde les lieux du sinistre, c’est l’angoisse, une certaine agitation mélancolique. On peut imaginer ce que ces Camerounais surpris dans leur sommeil, ont subit lors de leur ensevelissement. Véritable spectacle de la mort. Le matin, on découvre les premiers bâtiments effondrés, encore épars. Au fil des pas, l’image du désastre se densifie. Des corps, sont tirés de la boue, étalés sur le sol ou au seuil des maisons. Sur les lieux de l’éboulement ce n’est plus le tumulte qui frappe, mais le silence, parfois seulement percé de cris ou de pleurs, les secouristes mal équipés font ce qu’ils peuvent. Quelques personnes essaient de filmer  par automatisme, comme dans un sinistre rêve tout en regardant si les secouristes arrivent.

Le lieu est un amas de ruines. Les images emblématiques des autres catastrophes qu’il y a eues dans le pays nous reviennent à l’esprit. Par miracle un bébé est rescapé. Les ministres présents sont ébranlés. C’est une population hébétée qui se tient à ces endroits, malheureuse. Mbankolo n’existe plus, sauf sous ses décombres. Une multitude de corps alignés, hâtivement couverts d’un tissu sommaire, une foule de milliers d’hommes et de femmes se lamente. Moment de panique et puis, de nouveau, le silence. Son bilan ne sera jamais précisément établi.

Selon les sources officielles évoquées par le ministre Atanga Nji, il a été identifié 28 corps, mais les riverains parlent d’environ 200 personnes portées disparues. Des centaines de personnes y ont connu des traumatismes sévères et des blessures profondes. Des centaines de personnes se sont retrouvées sans abri, relogées dans des camps de sinistrés, ils n’ont ni eau ni nourriture. Voici les moments où on était en situation d’espérer l’élan solidaire de la diaspora. Chaque soir des intellectuels passent sur les plateaux pour condamner, on entend toutes sortes de plaintes, des  paroles de désespoir qui sortent dans la bouche de chacun.  Alors que c’est un moment de solidarité nationale.  Des rares associations ne se prononcent pas pourtant elles sont nombreuses  au Cameroun et en occident qui promeut le sens commun.  N’est-ce pas le temps  d’avoir un peu de  finesse et de partager  dans cette masse de désolation ?

Loading

Tendances

A Lire aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut