Avez-vous entendu sonner le tocsin ? C’est la réponse de l’élite africaine à la sortie médiatique du général français, François Lecointre, sur France Inter : Il faut recoloniser l’Afrique ! Ces propos ont fait bondir, et une fois n’est pas coutume, une élite habituée à lever le bouclier au lieu d’écrire sa propre histoire. Cette attitude devrait interroger tous ceux qui suivent les conséquences cachées de la mondialisation dont le but inavoué est la reconquête de l’Afrique pour s’accaparer de ses richesses endogènes. Les propos de François Lecointre ne sont pas un scoop. Il suffit de puiser les informations disponibles dans les archives de notre histoire récente.
François Lecointre, ancien chef d’état-major des armées s’est aussi distingué. Ses propos sont sans ambiguïté, clairs et concis : « On ne fait pas la guerre pour la démocratie, mais pour les intérêts de la France ». Le général Lecointre ne devrait pas surprendre tous ceux qui suivent la guerre ouverte qui n’est plus dogmatique, mais une nouvelle idéologie libérale de reconquête d’un pouvoir qui s’étiole.
Car, entre-temps, le monde a changé. Des acteurs nouveaux sont entrés en scène pour rééquilibrer le monde. Ces forces sont représentées par les pays du BRICS qui remettent en cause la suprématie économique et militaire de l’Europe et des Etats-Unis, sans oublier l’anglosphère. Le sinistre projet de recolonisation de l’Afrique nous ramène à la théorie de la falaise. Elle nous entrainera tous au fond du précipice si la sagesse ne l’emporte pas en ces temps de disettes. Les Etats-Unis perdent leur leadership. Et dans cette chute vertigineuse, ils entrainent l’Europe. Cette dernière l’a bien compris.
Pour redynamiser une alliance en berne, le seul levier à faire fonctionner reste l’Otan qui est une machine de guerre permanente. Les guerres au Proche-Orient et en Ukraine ne devrait pas nous endormir. Elles ne sont que le prélude d’une reconquête de l’Afrique. Le général Lecointre n’est que le triste porte-parole d’un projet bien ficelé. Pour reconquérir le monde, les pays de l’Otan n’ont plus qu’une issue : recoloniser l’Afrique qui reste le seul continent détenteur de matières premières rares. Ce scénario est-il possible ? Si les intellectuels africains avaient conscience du projet macabre en cours, ils ne se laisseraient plus dicter leur avenir. En effet, le projet de recolonisation de l’Afrique qui revient au jour reste bien ancré dans les projets cyniques de l’Occident.
Ce projet remonte à 1989, au cours d’un colloque international sur la Révolution française. Ce colloque se tenait à l’ambassade de France, en terre africaine, à Saint Louis au Sénégal. L’objet de ce colloque était de recoloniser en substance l’Afrique. Pourquoi serions-nous donc surpris que ce projet qui dormait dans un tiroir soit dépoussiéré ? Napoléon n’a-t-il rétabli l’esclavage en Outre-mer ? Pour ôter le doute, il suffit de remonter l’histoire de l’Afrique de l’esclavage à la colonisation. Le projet de recolonisation de l’Afrique ne devrait pas surprendre l’élite africaine abonnée à la politique de l’autruche. Elle refuse la vérité et se complait à une relation incestueuse qui fait d’elle le dindon de la farce qui se satisfait de la servitude volontaire car elle n’a jamais voulu la liberté.
La recolonisation de l’Afrique obéit aux campagnes actuelles qui nous conduisent vers une mondialisation où nous ne proposons rien en dehors de nos matières premières minières et agricoles dont nous ne maitrisons pas les prix. La guerre permanente depuis trois décennies en RDC et la CPI (Cour Pénale Internationale) en sont la parfaite illustration. L’Union européenne ne vient-elle pas de signer un méga contrat avec le Rwanda pour lui fournir les métaux rares que son sous-sol ne détient pas ? Pour pérenniser ce projet, l’Union européenne fournit des armes aux terroristes du M23, des mercenaires et une logistique pour piller sans vergogne les richesses minières de la RDC.
Ces actes barbares ne s’inscrivent-ils pas dans le projet de recolonisation de l’Afrique ? La levée des boucliers en cours par les élites africaines surprend tous ceux qui s’intéressent au devenir de l’Afrique qui saigne tous les jours et que personne ne sauvera en dehors des africains eux-mêmes. Les guerres au Sahel, en RDC, en RCA et au Soudan font partie d’un projet lugubre d’une nouvelle partition de l’Afrique. Le Soudan en est la preuve. Dans cette logique, ce projet va s’étendre au Mali et en RDC. Il suffit de créer le chao pour justifier la présence ou la création de nouvelles bases militaires en Afrique.
Le reste n’est plus qu’une question de temps. Et le temps ne joue pas en faveur de l’Afrique. Combien de temps laisserons-nous nos bourreaux esclavagistes et colonisateurs dépecer une fois de plus l’Afrique après la triste mise en scène de la conférence de Berlin (1884-1885) ? Un éveil des consciences peut-il changer nos attitudes face à un projet qui signe un retour de l’homme noir vers l’esclavage moderne tant décrié ? Tout reste possible car nos esprits trouvent dans la compassion un baume pour nos cœurs stérilisés.