Par Yana Bekima
La terreur scientifique devient redoutable de nos jours servant à béatifier les crimes qui se préparent contre l’Afrique. C’est l’instrumentalisation des soi-disant spécialistes de l’Afrique auxquels on donne la parole dans les médias internationaux afin que ceux-ci préparent les campagnes agressives contre l’Afrique par des légitimations pseudo-intellectuelles. Le modus operandi consiste à commencer par couvrir l’Afrique des calomnies à travers les médias aux ordres. Lorsque cela ne marche pas, on mobilise des soi-disant experts par des interviews préparés d’avance avec des éléments de langage qu’on leur met dans la bouche afin que ceux-ci donnent aux intentions néocolonialistes des puissances agressives, un cachet, une autorisation et une légitimité de type académique, voire universitaire de type scientifique.
Le terrorisme scientifique est l’instrumentalisation des gens probablement diplômés, difficilement intellectuels au sens noble du terme. Mais en tous cas, ce sont des individus drapés derrière le manteau d’une certaine expertise qui ont vocation à donner leur imprimatur, à donner pour ainsi dire un semblant de crédibilité épistémologique au projet criminel des grandes puissances néocolonialistes et impérialistes.
Une intervention qui s’inscrit dans la pratique du terrorisme
C’est dans cette manœuvre que RFI a interviewé Madame Niagalé Bakayoko le 29/01/24. En effet, elle avait été invitée par RFI sur les conséquences de la décision du retrait des États de l’AES de la CEDEAO. Elle a soutenu une seule thèse : « Le retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO, va entraver la libre circulation des populations en Afrique de l’Ouest ». Cette réponse est d’une grande incongruité surtout lorsqu’on sait tout ce qui a conduit à ce retrait. C’est un argument creux, inacceptable voire pernicieux. RFI lui a donné l’occasion de s’adonner à ce jeu qui consiste à construire dans le monde des idées, un cadre, un paradigme, « un environnement intellectuel dans lequel les agressions contre l’Afrique deviennent légitimes, ou à défaut d’être légitimes, deviennent légales. »
Pourquoi ce retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger ?
Tout d’abord, parce que la CEDEAO a pris depuis 2022 des décisions illégales, illégitimes, inhumaines contre leurs peuples à travers des embargos dont les textes de la CEDEAO ne prévoient pas la mise en œuvre, qui sont interdits par le droit international dans ses dispositions qui prévoient que : « les pays qui n’ont pas accès à la mer ne doivent jamais souffrir d’embargo ». Au lieu de constater que ces pays du Liptako-Gourma se sont retirés pour éviter une mort lente, cette dame est chargée de culpabiliser les victimes qui retrouvent une liberté d’action qu’ils avaient perdu en se soumettant à cette organisation. Soyons sérieux ! Croyez-vous vraiment aux propos de cette dame ?
Regardons les choses de plus près. Est-ce que l’embargo mis en place par la CEDEAO a pour but de favoriser la libre circulation des populations ou à l’entraver ?
« Lorsque vous vous sentez maltraité dans une maison, la seule chose qui vous reste à faire est de la quitter. » Nous nous étonnons que certains s’en étonnent. C’est le Niger qui subit les effets de l’embargo et non la France. Et ce sont ces États (AES) qui sont en train de desserrer la corde que la France a mise à leur cou sous les ordres de l’Union Européenne et des États-Unis. Comment peut-on présenter la victime pour le coupable en quelques secondes ? C’est quand même hallucinant !
Il est nécessaire de rappeler les précédents :
En janvier 2022, c’est la CEDEAO qui a commencé à entraver le Mali en fermant toutes les frontières afin de l’asphyxier. Où était cette dame lorsque ces pays suffoquaient à cause de cet embargo qui entravait la libre circulation des personnes et des biens. Son raisonnement consiste à « faire porter le chapeau des difficultés à ceux qui veulent sortir des difficultés », en d’autres termes celle de culpabiliser les victimes et de dédouaner les coupables. C’est une technique vielle comme le monde.
La terreur scientifique en action
A propos de la Lybie, c’est dans le même piège que nous nous sommes englués. Ils ont bourré le crâne à toute la planète avant l’assassinat de Kadhafi. On a commencé par nous dire que ce dernier était en train de génocider son peuple, en le présentant comme le diable en personne et qu’il était l’ennemi de la « démocratie parfaite ». Au point que lorsqu’il mourrait, il était malheureusement détesté par de nombreux Africains à la suite de cette campagne.
C’était une campagne diplomatique, médiatique, une campagne de terrorisme scientifique. Ce n’est qu’avec le recul du temps, en reconstituant les conditions dans lesquels il fut assassiné, que le crime fut révélé, notamment à travers le contenu des emails de Madame Clinton dans le scandale Wikileaks. Ils avaient décidé d’éliminer Kadhafi et de détruire la Lybie parce qu’elle se préparait avec d’autres puissances africaines de moindre importance stratégique à mettre fin à la suprématie du dollar, de l’Euro et du franc CFA.
Le modus operandi
L’Afrique est l’objet non seulement d’un terrorisme militaire armée, d’un terrorisme économique multiséculaire, d’un terrorisme politique, néocolonial, impérialiste, et négrier. L’on commence souvent par attaquer les justes cause africaines sur le terrain diplomatique, sur le terrain médiatique ; ensuite on les attaque sur le terrain pseudo scientifique en mobilisant des faux experts. Et lorsqu’ils ont fini, ils peuvent se permettre une intervention militaire grossière, tout en sachant que l’opinion a déjà été livrée au sol. Chaque fois que les grandes puissances colonialistes fourbissent et ourdissent les plans d’agression contre l’Afrique, ceci est toujours préparé à l’avance par une grande campagne diplomatique et médiatique. Tout cela a pour but de préparer l’opinion à l’éventualité d’une agression militaire hors normes et sans foi ni loi.
La Charte des Nations unies de juin 1945
La tentative de faire jouer l’article 7 de la Charte
Il y’a dans la charte des Nations Unies de juin 1945 de San Francisco, un chapitre particulièrement dangereux, le chapitre 7 que les Africains devraient lire. Ce chapitre prévoit dans quelles circonstances le Conseil de Sécurité peut procéder à une ingérence militaire ou à une action militaire contre tout pays qui constitue une menace pour la paix et la sécurité internationale. C’est le seul cas pour mener la guerre. Or l’argumentaire de cette dame a pour but de faire entrer la décision des États de l’AES dans le chapitre 7 de l’ONU. C’est donc une tentative de manipuler les faits pour les faire entrer dans les qualifications juridiques du droit international de nature à légitimer des actions d’agression du Bloc Occidental à l’intérieur du Conseil de Sécurité.
Comment la paix et la sécurité internationale peuvent-elles être menacés par les États de L’AES ?
Ce dispositif de communication mis en place par cette dame est tout simplement maladroit et même insidieux. Les Africains savent que « pour tuer son chien, on l’accuse de rage ». La suite du scénario est qu’au niveau du Conseil de Sécurité de l’ONU, la situation a beaucoup changé, on n’est plus en 2011. La Russie et la Chine se mordront toujours les doigts de ne s’être pas vigoureusement opposées à l’agression unilatérale des puissances de l’OTAN contre Kadhafi, contre la Lybie.
Maintenant en 2024, la Russie et la Chine ne laisseront plus passer une résolution permettant une agression contre un pays de l’AES. C’est une détermination diplomatique qui est posée comme un verrou. Mais ce premier verrou, à lui tout seul ne suffit pas. Quand bien même la Russie et la Chine opposeraient leur droit de véto au Conseil de Sécurité contre une tentative qui vise à utiliser le chapitre 7 de la Charte des Nations Unies, contre un des pays de l’AES, il reste que la coalition occidentale de l’OTAN est une coalition assez folle pour souvent attaquer des gens sans aucune résolution des Nations Unies. Il appartient donc aux Africains en général et aux dirigeants en particulier, aux armées et aux alliés sûrs de l’AES pour parer à cette éventualité.
Incriminer les Africains là où ils sont les victimes.
Madame Niagalé Bakayoko déguise ce qu’elle sait pour plaire à ses maîtres. Elle n’ignore pas que le continent est ensanglanté depuis 600 ans et que les populations africaines sont ballotées à travers tout le continent parce que les grandes puissances impérialistes occidentales en ont ainsi décidé.
Solution à la terreur scientifique
Aujourd’hui face à l’Alliance des États du Sahel, nous avons exactement affaire au même dispositif : lynchage diplomatique, médiatique ayant pour but de préparer une agression militaire. Les Africains doivent maîtriser ce mécanisme et combattre à tous les niveaux tous les terroristes scientifiques qui oseraient s’attaquer à eux dans tous les domaines. « La peur ne sert à rien. A force d’avoir peur on devient lâche. Il y’a des moments où il faut s’assumer », dit le premier ministre Malien Choguel Kokalla Maïga. Et de poursuivre : « nous avons à gagner plus qu’à perdre ».