Mag-Afriksurseine-Mars-2024

ROXANE YENOUDIE ECRIVAINE ET ENTREPRENEURE BURKINABE S’EXPRIME

ROXANE YENOUDIE

Propos recueillis par Baltazar ATANGANA

Roxane Soukaïna Lankoande est  une jeune  écrivaine burkinabè aux multiples casquettes de juriste et entrepreneure, assume actuellement la présidence de l’ONG « Supprimons la Marge ». Aujourd’hui, Afriksurseine a eu l’occasion de la rencontrer pour une interview approfondie au cours de laquelle elle a partagé des informations sur ses engagements dans le domaine de la littérature ainsi que les activités prédominantes de son ONG.

Présentez-vous à nos lecteurs.

Je suis Yenoudié Rébéka Roxane Soukaïna LANKOANDE. Juriste, entrepreneure et écrivaine. Je suis, par ailleurs, la fondatrice et la présidente de l’ONG Supprimons La Marge, en abrégé SUPLAMAR. SUPLAMAR est un Organisme burkinabè à but non lucratif.

Comment l’aventure SUPLAMAR a-t-elle débuté ? 

 L’aventure SUPLAMAR a officiellement débuté il y a maintenant six ans, mais le processus de création a été en lui-même une très belle aventure qui a mise sur mon chemin ceux qui sont aujourd’hui de précieux collaborateurs. La naissance de SUPLAMAR date de mes années universitaires. Etant déjà une féministe engagée à l’époque, mon engagement date du collège, je me suis très tôt battue pour les droits des jeunes filles sans même savoir ce qu’était le féminisme. C’est à force d’être taxée de féministe que je me suis intéressée au mot. Une fois au Lycée, créer une organisation est apparu comme une évidence à mes yeux. J’avais le désir ardent de faire bouger les choses, de changer le monde mais j’avais conscience que je n’y arriverais pas seule. C’est ainsi que dès ma première année universitaire, j’ai commencé à murir l’idée et à la partager avec des gens qui avaient la même vision que moi. Quelques années plus tard, en Octobre 2018, SUPLAMAR a officiellement vu le jour. SUPLAMAR est une bouffée d’air frais, car elle est entièrement composée de très jeunes femmes et hommes dotés d’un dynamisme exceptionnel.

Quelle est la marque de SUPLAMAR dans un contexte africain en général et burkinabè en particulier, où il y a existence d’une pléthore d’organisations œuvrant dans la promotion des couches les plus vulnérables ou vivant dans les conditions de vulnérabilité et de marginalisation ?

 SUPLAMAR se différencie des autres organisations à plusieurs niveaux. Comme je le disais tantôt, SUPLAMAR est une organisation 100% jeune et mixte. Nous intervenons principalement en milieu scolaire, car il s’agit pour nous d’inculquer très tôt aux enfants des valeurs telles que l’équité, la tolérance, etc. Pour se faire, nous sommes extrêmement proches de nos cibles. Cette proximité, ainsi que la jeunesse des équipes, ont l’avantage de créer un climat sûr pour ces enfants les rendant plus réceptifs et ouverts. Notons que nous sommes la première et la principale organisation locale à prendre à bras le corps  les questions de précarité menstruelle. Nous œuvrons depuis maintenant cinq années à travers le projet « Changeons les règles à l’école » (projet qui en plus de sensibiliser, brise les tabous et dote les élèves en protections hygiéniques). Plus récemment est aussi né le projet « Regard sur l’intimité » qui est une très belle réponse à la précarité menstruelle en milieu scolaire. En effet, ce projet vient nous permettre de doter des établissements en toilettes féminines, adaptées à la gestion hygiénique des menstrues. SUPLAMAR malgré donc sa jeunesse, se place comme pionnière et leader à plusieurs niveaux.

Vous dites « rêver d’un monde ou l’équité sera la norme ». Pensez-vous que seules des réponses globales et une action sectorielle sont à même de répondre aux crises d’aujourd’hui ? 

  Je vous dirai que la meilleure réponse à 90% de nos crises est l’éducation. L’éducation est le socle de toute société d’avenir. L’équité et la tolérance resteront des illusions tant que les enfants ne seront pas éduqués dans ce sens. Un enfant à qui on fait comprendre qu’un mari a le droit de battre son épouse ne pourrait être qu’un homme violent plus tard. Un enfant à qui on n’apprend pas à accepter la différence devient facilement un terroriste. Les exemples sont légions et c’est justement pour cette raison que nous fondons énormément d’espoir en l’éducation. William Sinclair avait en homme averti déclaré: « l’éducation est une richesse qui vous accompagne le long de votre existence ». J’ai tantôt parlé de 90%. Vous vous demandez sûrement où sont passés les 10% restants ? (rire). Les 10% peuvent être résolus grâce à l’autonomisation financière de « l’autre moitié du ciel »(la femme) car la pauvreté rend vulnérable. Une femme financièrement autonome égale à plusieurs enfants à l’abri du besoin.

 Comment donner les moyens aux communautés locales d’être en première ligne de ces actions ?

 Pour un meilleur impact, les populations locales devraient être actrices et non spectatrices. Pour ce faire, elles devraient être formées et outillées dans ce sens.

Quel est le rôle des pouvoirs publics en soutien à vos initiatives ?

 Les pouvoirs publics apparaissent comme des partenaires techniques pour SUPLAMAR. Il s’agit d’apports logistiques et de contributions morales. Ainsi dit, nous sommes en partenariat avec le ministère de l’éducation depuis maintenant deux ans.

Vous êtes également écrivaine. Vous avez publié « Déclic fatal », qui aborde le viol, les violences conjugales et la prostitution entre autres. Quel message passez-vous à travers ce livre ?

 Déclic fatal est un recueil de sept nouvelles qui brosse la précarité de la situation féminine en ces débuts de siècle, où il est de plus en plus question de droits humains et d’émancipation de la femme. Déclic fatal était pour moi une belle tentative d’attirer l’attention des uns et des autres sur toutes ces situations vécues par les femmes et les jeunes filles dans nos sociétés. En écrivant ce livre, je nourrissais le secret espoir d’activer la flamme féministe en chaque lecteur/lectrice.

Y a-t-il un aspect autobiographique dans ce livre ? 

Autobiographique, non ! Cependant, je puis vous dire que certaines de ces histoires ont été inspirées de faits réels. De réelles situations que mes yeux d’enfant avaient observées.

Quelle est la place de la jeune fille burkinabè aujourd’hui face aux violences généralisées, tendance à travers le monde ? 

Aujourd’hui, je peux, sans peur de me tromper, dire que la jeune fille burkinabè a décidé de quitter ce rôle d’éternelle victime. Nous avons aujourd’hui une génération de femmes qui n’a pas froid aux yeux, qui ose dire non et qui se bat pour défendre les causes qu’elle juge juste. La jeune fille burkinabè a donc décidé d’être l’héroïne de sa vie et de celle de ses consœurs et confrères. Je profite d’ailleurs de votre tribune pour rendre hommage à toutes ces femmes et jeunes filles au front pour défendre le territoire burkinabè.

Un mot pour les jeunes filles et les femmes qui vous liront à travers le monde ?

 Mesdames, des femmes avant nous,  ont tout sacrifié pour nous obtenir chaque droit dont nous disposons aujourd’hui. Nous avons à notre tour le devoir de veiller à l’évolution et au respect de ces droits. Mesdames, « l’autre moitié du ciel »( la femme) vient de très loin et nous avons le devoir d’aller encore plus loin pour les femmes d’hier, pour celles d’aujourd’hui et pour celles de demain.  Merci

Loading

Tendances

A Lire aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut